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26 et 27 mars 2016,  Kananga / Tshikapa

Un grand merci à Brassimba Kananga ou nous avons été chaleureusement accueilli par Monsieur Fili.

La piste entre Kananga et Tshikapa est réputée être un vrai cauchemar.  Nous décidons de  prendre Moise avec nous pour nous aider. Il est bien connu pour ses prouesses dans la mer rouge alors nous comptons qu’il fasse la même chose avec la piste de Tshikapa !

Nous connaissons Moise depuis 3 ans lorsque Yann travaillait à Kananga, chauffeur et mécanicien, c’est quelqu’un de sérieux mais aussi très drôle avec toujours une petite histoire congolaise à raconter.

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Avant de vous faire partager cette petite virée congolaise entre Kananga et Tshikapa, voulez-vous rapidement visiter Kananga ? Oui ! Alors allons-y avec quelques photos

 

Vérifications minutieuses ( comme toujours) de la Toy

Nous quittons Kananga à 9h15. A 20km de Kananga (S5 56.522 E22 16.723) nous laissons l’abominable N1 sur notre droite et filons vers le sud en direction de l’Angola. Cette piste a été faite par les chinois en collaboration avec le gouvernement Angolais pour favoriser les échanges entre les deux pays. Nous tenons cette info des villageois, je ne peux donc pas vous la certifier à 100%. Ce que par contre je peux vous affirmer, c’est que cette piste existe bien et que c’est une vraie autoroute.

Les kms défilent……. C’est même un peu rasoir. Rien à  mettre sous l’objectif, pas de paysage,  pas un bourbier, pas de passage difficile. L’effet Moise semble bien fonctionner !

Vers 15 h un contrôle police (S6 22.982 E22 15.410),  on ne contrôle  aucun document mais le « petit rien » doit être donné !

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Enfin le village de Tshibala (   S6 55.733 E21 56.287) finie l’autoroute.

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Ça se rétrécie

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Nous remontons vers le nord puis à l’ouest, puis au sud, puis au nord etc… +/-180 km de zig zag sur une piste que j’ai appelé la « piste villages ». En effet, pas un espace sans village c’est assez impressionnant. Pas de bourbier ni de grosses difficultés  mais une piste dangereuse, fatigante et encore  rasoir. Sans arrêt faire attention, la piste est légèrement surélevée et étroite. Les enfants sortent de tous les côtés. Cas extrême, un bébé au beau milieu de la piste juste à la sortie d’un virage !

Si vous ajoutez à cela, les poules, les poussins, les canards et canetons, les chiens, les cochons étalés dans les flaques d’eau , vous augmentez votre probabilité de « tracasseries »   dangereusement.

Les villages sont toutefois agréables, beaucoup de jolies maisons et j’ai retenue celle ci avec les inscriptions… merci… c’est aussi ça le CONGO

 « La vie est belle mais le monde est jalous »  « Porte des souliers ne craint pas les epines »  « un voyage de 1000″km commence par 1 pas » 

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Les enfants partout

Des situations amusantes comme par exemple lorsqu’il y a un meeting (religieux ou politique) dans un village. Tous les villageois sont assis, attentifs à ce qui ce dit (enfin je crois !) et lorsque l’on passe, je lève la main pour dire bonjour et là c’est l’euphorie générale. Plus personne n’écoute l’orateur, pourtant muni d’une solide sono, et tous lèvent les bras, crient, rient en nous voyant passer : Mutoké mutoké mutoké ( le blanc en tchiluba)

Malgré ces petits moments sympas, je dis à Yann,  je m’ennuie, pas de paysage, pas d’animaux, fait chaud, j’ai soif, j’ai faim…. bref je fais ma capricieuse  ( et alors j’ai le droit , non ? )  Yann en a marre aussi

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Il regrette presque de ne pas être passé par la N1. Impossible de nous arrêter sans être littéralement assailli, et le mot n’est pas exagéré.

Nous voyons une pancarte, une direction vers Tshibala ( d’ou nous venons ) et une autre vers l’Angola . Nous sommes à une quarantaine de kilomètres de la frontière. On se regarde , sourires, puis éclats de rire…non ça ne serait pas raisonnable et puis on a promis à Michel de lui faire cette traversée!!

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Vers 15h15 Yann me dit, ici les villages ne sont plus entretenus. Effectivement, la piste est plus mauvaise, des grandes herbes partout, les villages sont sales et les gens « bruyants » ( pour rester soft).  Peut être un peu d’action alors …

15h30, juste après un virage, BINGO,  un barrage.  un type entrain de jouer avec une pelle ( pantalon rouge), un vélo sur la droite et un petit tronc d’arbre sur la piste. Yann pourrait passer sur le tronc mais il ne veut pas effrayer le vélo sur la droite. Le chef de la pelle  lui fait signe de passer à gauche. Yann est fatigué et ne prend pas le temps de descendre sonder…fatale error !

Yann passe et racle, avance un peu et puis plus du tout. Marche arrière, marche avant rien y fait. Bien plantée la toy. Je descends de la jeep , pas facile dans cette position, ça pouir , berk, mais tant pis,  j’y vais, enfin un peu de pili pili

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Pas de pelle, le bourbier sent trop mauvais, le choix du T max sera retenu.

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Moise nous dit tout de suite que c’est un piège et que le type est complètement « chanvré » et saoul.

Très vite plusieurs personnes arrivent. « Donnez-nous l’argent » « vous devez nous aider » …. J’entends même Yann lancer un «  ta gueule » Un autre viendra vers moi «  vous filmez, donnez l’argent » ( on l’entend dans la vidéo)

Le treuil est installée, le palmier craque mais tient et la toy sort.

Un vieux papa qui regardait la scène sans rien dire explique à Moise que le type qui est chanvré a entendu le moteur de la machine (la jeep). Il a demandé au vélo de rester sur la droite car comme ça « le blanc va vouloir t’éviter et il ira à gauche » Bien vu, mais ce qu’il n’avait pas prévu c’est que « le blanc » pouvait sortir la jeep sans lui. On entend même parmi les spectateurs « eza machine mercenaire » !

Moi je suis contente, j’ai enfin un peu d’action, des photos et une vidéo.

Il est 16h, c’est à cette heure qu’habituellement  nous commençons à chercher un endroit pour camper mais ici nous sentons que cela va être difficile.

40 km, 17h30,  un pont. Inspection faite,  ça passe mais il faut encore négocier avec un type, puis deux. Ils sont les gardiens du pont ! Ils mettent sur le pont une poutre en fer pour guider la roue droite de la jeep. Il faut la retourner car le pneu est plus large, ils refusent c’est comme ça que ça doit passer sinon nous allons tomber à l’eau. Pas question, Moise retourne la poutre. Moise doit guider Yann mais ne comprend pas qu’il faut faire des gestes simples, soit à droite soit à gauche . Yann me fait signe de prendre le relais.  Je me concentre,  je guide, je filme et je fais comme si j’étais toute seule !

 

Un peu plus loin une rivière mais pas de pont ! je ne trouve plus le passage !

18h36, le soleil est couché et toujours pas d’endroit pour dormir

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La piste est de plus en plus mauvaise et il fait nuit.

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De profondes ravines,  à droite, à gauche, pendant de longs mètres. je n’ai pas pris de photos des endroits les plus craignos, pas vraiment possible tellement la concentration était au top. Yann me lance: On voit mieux les reliefs la nuit ! ça c’est certain

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et des villageois et vélos partout. c’est flippant

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Et puis un autre pont

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et encore un autre

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A 20h, une jeep sur la piste et personne. Yann et Moise vont sonder les matitis .

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ça passe.  Heureusement que nous ne l’avons pas  trouvé en montant la piste avec les ravines. Finalement on a de la chance !

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A 20h36 encore un pont mais un petit endroit pour dormir juste avant. Yann a conduit pendant + de 12h, nous avons fait 347 km et  nous sommes à 25km de Tshikapa mais sommes trop fatigués pour continuer et c’est trop dangereux.  Douche (chaude), dîner, et nous écoutons Moise. Ils nous racontent que le village ou nous étions restés plantés entre Mbiji-Mayi et kananga, il le connait bien, on l’appelle « le village des mercenaires » « ces gens-là sont  mauvais. »

Nous allons nous coucher pensant passer une nuit tranquille. Tranquille oui, jusqu’à 3h du matin !

A3h du mat nous entendons des bruits de vélos sur le pont. Normal, il est rafistolé avec des tôles donc un peu sonore ( vidéo et photos à la fin de l’article). Je regarde par la vitre et je vois une grande robe blanche ! Un druide ? J’ai du mal voir. 5 minutes plus tard nous entendons un homme chanter. Puis des pas, beaucoup de pas. 3 têtes près de la vitre du coté de Yann. Une nouvelle fois je regarde de mon côté et j’aperçois (c’est la pleine lune) un groupe de personnes à 20 mètres environ derrière la jeep. Yann me lance,  «  mais c’est pas possible, même le nuit ils vont venir nous E…. »

Nous entendons alors un discours, des chants, des pleurs d’enfants.  Yann enfile son pantalon !   Puis,  je vois 5 têtes passer de mon côté.  J’ai l’impression que ce sont des baptêmes. On entend clapoter puis comme 5 coups de torchons que l’on fouette dans l’air et puis amen, amen, amen, amen, amen ! Les 5 personnes repassent de mon côté et en voici 5 autres qui avancent. Ça a duré 2 heures !

Dimanche 27 mars. Cocorico il faut se lever.       

Nous demandons à Moise de nous raconter ce qu’il s’est passé hier soir

La version de Moise est  beaucoup plus poétique et plus longue que la mienne. Je l’ai enregistré pour ne pas en perdre un mot. Pas toujours facile à suivre mais  j’ai scrupuleusement écrit ce qu’il nous a dit.

« Les voleurs de poulets, ah bon,  ça n’était pas des druides ?

En venant là, ils ont observé la jeep. Il y avait une équipe de dirigeant devant, le prophète, la robe blanche et le démon à la robe rouge. Ils ont pris peur en voyant la jeep mais normalement le saint esprit ne prend pas peur. Maintenant l’autre là, le soit disant prêtre avec la robe blanche, il s’est donné le courage d’avancer avec son aide, son adjoint en robe rouge.

Quand ils sont arrivés ils ont défendu les autres pour ne pas allumer la lampe torche. Moi aussi comme ils m’ont dérangé,  je comptais aussi allumer ma lampe torche pour envoyer le mouvement mais je suis resté calme pour observer le mouvement. J’avais la lampe que Monsieur Yannick m’avait donné et la mat’chette.

Yann demande à Moise : mais ils ne t’ont pas vu ?

Moise continu : Ils ne comprenaient pas que j’étais là,  ils voyaient seulement la bâche. Moi j’étais enroulé dans la bâche, devant la voiture. Maintenant il y a l’un d’eux qui est venu pour se changer et en venant là, il a bougé la bâche. Maintenant, moi, je suis obligé de faire le mouvement : Toi ! Pourquoi tu me déranges. Il a cru là que ce sont des militaires ou des policiers. En tremblotant il a dit : « papa, papa, je n’ai pas vu, resté calme » je suis resté calme pour ne pas créer le  trouble de l’ordre public.

Ils ont eu maintenant courage de se changer. Ils sont partis vers l’eau. On baptisait 5 personnes par 5 personnes.

« 1er groupe allez 1er groupe, 5 diacres »  et les diacres avancent en première position. Après avoir lavé les diacres, on bénit au nom du père, du fils et du saint esprit, vous dites amen, vous sortez, vous vous mettez de l’autre côté et vous appelez le 2ème groupe. 2eme c’était quoi ? Les garçons d’abord 5, 5, 5,5 après les papas 5, 5, 5,5 maintenant le filles, c’est-à-dire en général. Maintenant,  quand on appelait le filles là, le filles en venant là, y’avait des enfants qui pleuraient pour ne pas entrer dans l’eau. «  Oh moi je n’pars pas à cette heure dans l’eau »  pleurs pleurs …   y’avait trop de bruit là, je comptais lui demander, que non,  comment vous créez du tapage nocturne. Vous trouvez les gens endormis, hein, mais je ne voulais pas faire des dégâts parce que je ne voulais pas qu’ils sachent qu’il y avait des gens à l’intérieur de la jeep là. J’étais resté toujours calme.

Maintenant l’homme-là, le baptiseur, il était déjà fatigué. Il a renvoyé les enfants pour dire que, maintenant vous allez vous mettre de l’autre côté mais en ordre.

Maintenant la finition, c’était avec les femmes. Vous allez m’envoyer 5 femmes par groupe. Maintenant l’autre interprète diabolique de l’autre côté, il disait que, non,  lui n’a pas l’ordre interpeller 5 femmes,  vous pouvez partir même en vrac. C’était à mi- voie de là ou j’étais. Celui-ci donne l’injonction et celui-la contredis. Maintenant en appelant 5 femmes, d’abord les prophétesses, les visionnaires, c’est elles qui doivent occuper la 1ere position   il y a eu 3 femmes qui sont arrivées, il fallait 2 autres femmes. Ils sont partis chercher 2 autres. Parmi les 2, il y avait une qui n’était pas prophétesse et il y avait une prophétesse qui était restée. Maintenant on est en train de faire,  quoi,   de faire passer la cérémonie de ce côté, et une discussion s’engage de l’autre côté : « comment celui qui donne l’injonction, la, il  ne connait pas nos identités, comment on peut interpeller telle pour nous laisser nous »

Maintenant, l’autre, le semeur de désordre dit «  dites à votre type-là qu’il agrandisse un peu la vitesse,  il ne sait pas qu’il est déjà 5h » Qu’est-ce que nous allons faire, le baptiseur était maintenant  convaincu

Et il a commencé à mettre la vitesse et baptiser les groupes de femmes. Il a fait cette opération comme ça (Moise claque les doigts) et c’était déjà passé

Maintenant là, le baptiseur fait une dernière prière d’adoration mais il était bref parce qu’il était déjà abattu. Le baptiseur démarre le retour et dit comme ça : «  celui qui tombe en route il va payer les pénalités, les pénalités c’est quoi …les poulets. « Avant de rentrer dans votre parcelle vous restez à l’extérieur et moi je fais la cérémonie, après vous donnez les poulets ». Il a cantonné la prière mais les femmes derrière ne suivaient pas car il y avait toujours le démon qui diabolisait le groupe. Ça a traîné longtemps et après ils sont partis.

Monsieur Yannick, Madame gégé, si vous étiez sortis de la jeep là, dans ce moment,  ils auraient vu Dieu, et le prophète aurait reçu beaucoup de pénalités ! »

Ça c’est les kimbandiste selon Moise.

Vers 5h nous tentons de refermer les yeux pour quelques heures mais le jour pointe, la nuit est terminée.

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Les villageois arrivent, ça recommence ; « donnez l’argent, ne serez ce qu’un 50$ ! » «  Vous le blanc vous devez nous aider » « donner l’argent et je souffle le mot » ! Là, je ne comprends pas. Je raconte ça à Moise et nous avons l’explication. Ils nous prennent pour des chercheurs de diamants. Si nous donnons de l’argent on nous soufflera donc la position de l’endroit merveilleux ! Mais papa si tu connais l’endroit tu n’as pas besoin d’argent, tu es riche !

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Le chef de village arrive en moto, vêtu d’une veste extrêmement…. comment dire…stylée . Il  vient vers moi et commence à demander l’argent. Je le renvoie gentiment vers le chef, le boss, l’homme… Il faut payer le droit de passage du pont. Yann refuse.

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Ça continu, donnez l’argent. Moise intervient : «  ce n’est pas la peine de demander, ce blanc-là ne cède pas » !

Nous décollons  à 9h45 vers Tshikapa.

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La piste est relativement bonne. Nous sommes toutefois contents d’avoir trouver l’endroit pour dormir en voyant certains passages un peu, humm humm …

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Celui la n’a pas eu de chance

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Une jolie vue

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et nous arrivons à Tsikapa vers midi

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nous nous rendons chez EDC. Un grand merci à Monsieur Vanhoutte directeur de la société d’électricité EDC pour l’accueil de nous avons eu. Nous sommes au paradis.

Cette piste, plus longue de +/- 130 km, est donc possible pour rallier Kananga à Thsikapa sans trop de galères. Faisable dans une journée certainement si vous partez tôt

Nous restons deux jours pour souffler et le 29 mars nous prenons la route vers Kikwit. Moise repart à 10h00 vers Kananga en moto par la N1, il arrivera le lendemain à 15h.

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